La perte de vue en milieu urbain constitue, en théorie, un trouble du voisinage. En pratique, le milieu urbain est en constante évolution, ce qui rend difficile de prouver la perte de vue et, plus encore, d’obtenir une indemnisation. Analyse de cas.
Qu’est-ce qu’une perte de vue en milieu urbain ?
La perte de vue en milieu urbain correspond à une obstruction de la vue pour un propriétaire du fait d’une nouvelle construction ou de l’implantation d’une installation urbaine.
Une propriétaire d’une maison a saisi la justice au motif que deux maisons se sont construites dans un lotissement créé au sud de son terrain. Elle affirme que ces constructions obturent la vue dégagée dont elle bénéficiait sur la campagne et créent des vues sur sa propriété. Selon elle, cette nouvelle configuration urbaine entraîne une dépréciation de son bien immobilier.
Après le passage d’un expert, elle décide d’assigner les propriétaires des deux maisons ainsi que le constructeur en justice et réclame une indemnisation pour préjudice. Sa demande est rejetée. Les juges estiment que « la modification du plan local d’urbanisme dont les constructions ne sont que la conséquence, les propriétaires des nouvelles maisons ne pouvant être tenus pour responsables de la modification des règles locales d’urbanisme ».
La décision de la Cour de cassation
La propriétaire exerce un recours devant la Cour de cassation. Une fois de plus, la demande est rejetée. Les juges suprêmes affirment que « nul n’était assuré, en milieu urbain ou en voie d’urbanisation, de conserver son environnement qu’un plan d’urbanisme pouvait toujours remettre en cause ».
Conséquence, même si la construction modifie le cadre de vie et prive la propriétaire de la vue dégagée dont elle bénéficiait auparavant, le droit à la vue dégagée n’est pas protégé dans un milieu urbain en pleine expansion. En outre, la Cour juge que « la perte de vue, dont rien ne démontrait la nature d’intérêt ou le caractère d’exception, ne caractérisait pas, dans ces circonstances, l’anormalité du trouble invoqué ». À cela s’ajoute, le fait que la perte d’intimité évoquée par la propriétaire n’a pas été précisée et partiellement compensée par la plantation de végétaux.
Une vue particulièrement belle et très affectée
En conclusion, suite à la décision de la Cour de cassation, la perte de vue peut constituer un trouble anormal du voisinage indemnisable uniquement dans certaines circonstances. Il faut que la vue soit particulièrement belle et très affectée (perte d’ensoleillement ou d’intimité) par la nouvelle construction voisine.
Mais attention, comme le montre le cas précédent, il est difficile d’admettre ce type de situation dans un milieu urbain voué à l’expansion.
Pour aller plus loin :
- Consulter le jugement de la Cour de cassation
- S’informer en matière d’Immobilier
- Retrouver l’article d’origine sur Les Echos