Dette privée : le domicile conjugal d’un couple marié peut servir de garantie

23/02/2024

La justice confirme que le domicile conjugal peut servir de garantie au fisc pour rembourser la dette contractée par un seul des époux. Analyse d’un cas concret.

Dette privée : quelle responsabilité de l’époux ?

Quelle surprise pour l’épouse lorsqu’elle apprend que son domicile conjugal est saisi par l’administration fiscale pour rembourser une dette contractée par son conjoint. C’est la situation qu’a examinée la Cour de cassation récemment. La décision finale de cette dernière est claire : il n’y a rien d’anormal dans cette situation, même si la procédure de saisie conduit à priver la personne de son logement (Cass. Civ 1, 31.1.2024, B 23-18.056).

Le mari était poursuivi par un percepteur pour une dette. Ce dernier avait engagé la saisie du domicile conjugal. Le couple était marié sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, régime appliqué par défaut si aucun contrat spécifique n’est établi lors du mariage.

Le logement commun peut-il rembourser une dette privée ?

L’épouse a saisi la justice pour contester la procédure de saisie engagée par l’administration fiscale. Selon elle, le domicile conjugal est un bien commun. Il ne peut donc servir de garantie pour une dette personnelle contractée seulement par son conjoint.

De plus, elle invoque le principe de responsabilité personnelle. Ce dernier s’oppose à ce qu’un créancier d’un seul des deux époux se fasse payer par la vente forcée d’un bien qui appartient en partie au conjoint. D’autant plus, si cette démarche prive l’épouse d’un logement décent. En effet, le droit à un logement décent et le principe de responsabilité personnelle sont deux droits à valeur constitutionnelle. Sur ces bases, on pourrait penser que la décision de la Cour de cassation pencherait en faveur de l’épouse sur ce dossier.

Responsabilité civile du conjoint du débiteur

Mais la Cour de cassation met le doigt sur un détail : la loi prévoit que la responsabilité civile d’une autre personne que l’auteur du dommage peut être engagée. Ainsi, suivant ce principe, les dettes de chacun des époux sont garanties par leurs biens communs.

« La possibilité de poursuivre, sur le fondement de l’article 1413 du code civil, le recouvrement de dettes fiscales nées du chef d’un époux pendant la communauté sur les biens mobiliers et immobiliers communs, à moins qu’il n’y ait eu fraude de l’époux débiteur et mauvaise foi du créancier ». L’époux peut donc être légalement tenu responsable des dettes de son conjoint.

Pour confirmer sa décision, la Cour de cassation a rappelé son jugement du 17 janvier qui confirme qu’en adoptant le régime de communauté, chaque époux s’engage selon la loi à assumer le paiement des dettes de l’autre. Elle précise que cette loi est conforme à la Constitution (arrêt du 31 janvier).

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