Crédits immobiliers : la production divisée par deux en un an

18/08/2023

Les Français sont de moins en moins solvables. En un an, la production de crédits immobiliers a chuté de près de 50 %. Prix de l’immobilier trop élevé, baisse du pouvoir d’achat et hausse des taux d’intérêt, les causes de cette baisse spectaculaire sont multiples. Le point sur la situation.

Une production de crédits en chute libre

L’accession à la propriété est désormais un véritable parcours du combattant pour de nombreux Français. En un an, la production de crédits a reculé de 41 %, selon les données de la Banque de France. Elle s’élève à 11 milliards d’euros en juin dernier, contre 19 milliards d’euros en 2022. « La production de mai à juillet par rapport à la même période de 2022 a chuté de 51,5% et le nombre de prêts de 50,5% », explique Michel Mouillart, professeur d’économie et porte-parole de l’Observatoire Crédit Logement CSA.

Qu’on ne s’y trompe pas, la demande de crédits est toujours présente, mais peu de Français présentent un dossier solvable. Autrement dit, de nombreux candidats se voient refuser un prêt immobilier. En cause, l’inflation et la hausse des taux d’intérêt. Pour lutter contre l’inflation, la BCE a relevé ses taux directeurs en juin dernier, pour la neuvième fois consécutive, durcissant sa politique monétaire.

Paradoxalement, alors que les taux d’intérêt s’envolent, le « coût relatif » de l’acquisition d’un logement est en baisse. C’est le constat du dernier rapport de l’Observatoire Crédit Logement-CSA. Ce dernier note une hausse des revenus des emprunteurs depuis 2023 et un effacement des ménages les plus modestes. Concrètement, un fossé se crée entre ceux qui ne peuvent pas accéder à la propriété et ceux qui y accèdent à un coût moindre grâce à des revenus importants.

Vers une « panne de marché » ?

« Nous n’avons jamais atteint un seuil aussi bas hormis en 2020, pendant la période du Covid où les banques ont fermé leurs portes, et en 2008-2009 pendant la crise des subprimes, deux cas à prendre avec des pincettes, car nous étions hors d’une activité de marché habituelle », analyse Michel Mouillart pour le quotidien Le Parisien. En juin 2023, les taux moyens des crédits ont atteint 3,59 % sur 15 ans, 3,72 % sur 20 ans et 3,84% sur 25 ans. Contre respectivement 1,65 %, 1,79 % et 2 % en juin 2022, selon Meilleurtaux.com. À la rentrée, les experts pronostiquent un taux dépassant le seuil symbolique de 4 %.

Conséquence de la chute d’activité du marché du crédit, le marché de l’immobilier est en berne. Les prix affichés baissent trop lentement et de façon hétérogène. Même si la durée d’emprunt s’allonge considérablement, les emprunteurs peinent à trouver des biens en accord avec leur budget. Pourtant, près de 66 % du volume des crédits contractés s’étalent sur une période de 20 à 25 ans, contre 46 % du volume en 2019. Pour aller au bout de leur projet immobilier, les emprunteurs n’hésitent plus à négocier, allongeant les délais de vente.

Une situation « normale » selon Bercy et la Banque de France

Pour la Banque de France, la situation est loin d’être alarmante. Il s’agit simplement d’un « retour à la normale ». « Nous revenons à un niveau observé régulièrement avant 2015, on a quitté l’exubérance des dernières années, nous sommes dans une phase de normalisation et ne sommes pas préoccupés », explique François Mouriaux, directeur des statistiques monétaires et financières à la Banque de France.

À Bercy, même son de cloche. Selon l’entourage du ministre de l’Économie, il s’agit d’un « point bas ». « L’immobilier est arrivé à un point de bascule, il a quitté une période exceptionnelle d’activité pour revenir à un niveau plus normal avec le retour de l’inflation ». Le gouvernement mise sur une baisse significative des prix de l’immobilier pour relancer la machine. Pour donner un coup de pouce aux emprunteurs, le taux d’usure a été rehaussé au 1er août. Désormais, les établissements bancaires peuvent octroyer un crédit immobilier jusqu’à 5,33 % pour les prêts à taux fixe de 20 ans et plus.

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