Succession : l’obligation de choisir

13/03/2025

La Cour de cassation a rendu un arrêt qui lève le doute sur le comportement à adopter si vous êtes héritier. Spoiler alert, en cas de succession, le silence n’est pas une option. Explications.

Qu’est-ce que la sommation d’opter ?

Le silence n’est pas toujours d’or. Surtout en matière de succession. Lorsque vous héritez, vous êtes complètement libre de refuser ou d’accepter l’héritage. En revanche, il est déconseillé de faire l’autruche et ne pas prendre de décision.

Pour éviter l’indécision et l’étalement de la succession sur plusieurs années, le Code civil a introduit la notion de « sommation d’opter ». Il s’agit d’un mécanisme qui permet aux créanciers, cohéritiers ou autre partie d’obliger les héritiers à faire un choix dans un délai strict.

En clair, en tant qu’héritier, vous êtes dans l’obligation de prendre une décision quant à l’héritage qui vous revient :

  • accepter sans condition,
  • renoncer,
  • accepter sous bénéfice d’inventaire à hauteur de l’actif net.

Cas pratique : un décès et des dettes

Le 5 février dernier, la Cour de cassation s’est penchée sur un cas de succession dans lequel les héritiers n’avaient pas tranché. En raison des dettes laissées, l’affaire a été portée en justice. La succession comportait une dette de 91 545 euros due au syndicat de copropriété.

Un premier délai de 4 mois, à partir du jour du décès, est octroyé aux héritiers pour laisser ces derniers faire le deuil et prendre une décision (article 771 du Code civil). Passé ce délai, les créanciers peuvent contraindre les héritiers à faire un choix (alinéa de l’article 771 du Code civil) dans un second délai plus restreint.

Concrètement, les créanciers font parvenir un acte extrajudiciaire par voie d’huissier aux héritiers afin de les sommer d’accepter ou de refuser l’héritage dans les deux mois suivant la réception de l’acte. Dans le cas étudié par la Cour de cassation, les trois héritiers ne se sont pas manifestés. Le créancier, à savoir le syndicat de copropriété, les assigne en justice. Pour lui, le silence vaut accord.

Le silence est un choix par défaut

La Cour d’appel de Nîmes donne raison au syndicat de copropriété et condamne les héritiers au paiement de la dette. Ces derniers refusent et portent le cas devant la Cour de cassation.

Les Sages fondent leur raisonnement sur l’imparable article 772 du Code civil : « À défaut d’avoir pris parti à l’expiration du délai de deux mois ou du délai supplémentaire accordé, l’héritier est réputé acceptant pur et simple ».

Pas de doute possible. Les trois enfants héritiers, en raison de leur silence prolongé, sont réputés avoir accepté la succession, et donc la dette de 91 545 euros. « Ce qu’il faut retenir, c’est que quand on est sommé d’opter, il faut agir dans le délai de deux mois. Soit en prenant parti, soit en saisissant le juge compétent pour demander un délai supplémentaire », analyse la notaire, Marie Choplin-Texier.

Pour éviter l’acceptation forcée d’une succession non-désirée, il faut donc se manifester dans le délai et choisir une option. En cas de silence prolongé, la loi considérera que vous acceptez l’héritage même si ce dernier est uniquement constitué de dettes. Pour rappel, vous pouvez être tenu d’éponger les dettes avec votre propre patrimoine si nécessaire.

À noter : vous pouvez demander un délai supplémentaire au juge judiciaire pour faire votre choix, si vous justifiez votre requête par un motif sérieux et légitime.

Pour aller plus loin :

  • Pour approfondir la décision de la Cour de cassation, lisez le pourvoi.
  • S’informer en matière de Transmission
  • Retrouver l’article d’origine sur Les Echos