Immobilier : l’usufruitier a des droits mais aussi des devoirs

29/11/2024

La Cour de cassation a récemment considéré comme faute grave la carence totale de l’exercice de l’usufruit. L’absence d’actions a conduit à la dégradation manifeste de l’immeuble démembré. Conséquence, l’usufruitier a perdu son droit absolu sur le bien immobilier. Explications.

Le rôle de l’usufruitier dans un démembrement

Lors du démembrement d’un bien immobilier, le droit de propriété est réparti entre le nu-propriétaire et l’usufruitier. Ce dernier dispose du droit de percevoir les fruits du bien immobilier. Ce privilège s’accompagne de certaines obligations :

  • jouir du bien de façon raisonnable ;
  • prendre toutes les mesures pour maintenir le bien en bon état.

L’usufruitier a donc le devoir d’entretenir et effectuer les réparations nécessaires, tout comme il doit régler les factures (articles 605 et 608 du Code civil).

Cas concret d’abus de jouissance

Ainsi, lorsque la veuve d’un homme décédé, récupère l’usufruit de tous les biens immobiliers de la succession, elle se doit de répondre à ses obligations d’usufruitière. Or, les enfants du défunt reprochent justement à leur belle-mère un défaut d’entretien d’un immeuble successoral. La cour d’appel rend un verdict en leur faveur et prononce l’extinction de l’usufruit du bien concerné. Mais la veuve porte l’affaire en Cour de cassation.

La Cour de cassation rappelle les points suivants (C. civ. art 618) :

  • l’usufruit peut cesser par l’abus que l’usufruitier fait de sa jouissance (dégradations commises ou manque d’entretien).
  • Suivant la gravité des circonstances, les juges peuvent prononcer l’extinction absolue de l’usufruit ou ordonner la restitution de la jouissance du bien au propriétaire en échange d’une somme payée à l’usufruitier.

La Cour de cassation s’en remet à l’appréciation de la cour d’appel qui a retenu la carence totale et ancienne de la veuve dans l’exercice de son usufruit, étant à l’origine de la dégradation manifeste de l’immeuble. Ce manquement à ses obligations impose la réalisation de travaux importants dans l’immeuble avant toute entrée dans les lieux. De ce fait, la faute commise est grave. Elle est donc sanctionnée par l’extinction absolue de l’usufruit.

Définition de l’abus de jouissance

Considéré comme une des causes d’extinction de l’usufruit, l’abus de jouissance peut se matérialiser de diverses manières. Le manque d’entretien ou la dégradation du bien sont simplement des exemples. Globalement, l’abus de jouissance peut se définir comme tout acte de l’usufruitier de nature à compromettre la conservation et la restitution du bien immobilier.

Le fond de l’abus et l’évaluation de la sanction sont ensuite évalués au cas par cas selon l’appréciation des juges. Les tribunaux prononcent généralement la déchéance dans le cas de faits graves où la mauvaise volonté de l’usufruitier est flagrante. Attention, cette peine civile ne semble pas s’appliquer en cas de quasi-usufruit. Pour rappel, le quasi-usufruit a le droit d’user du bien immobilier comme il l’entend, à charge de restitution du bien ou de son équivalent lors de la fin de son droit.

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