En principe, un contrat d’assurance-vie permet à son bénéficiaire d’être exonéré de droits de succession au décès du souscripteur. Il peut donc être tentant d’avoir recours à ce mode de placement plutôt que de faire une donation. En effet, les donations sont soumises à des droits de mutation. Cependant, dans certains cas, l’administration fiscale peut décider de requalifier la transmission d’une assurance-vie en donation indirecte. Elle est donc en droit de réclamer au bénéficiaire de s’acquitter des droits de mutation. Si elle peut également y faire appliquer une majoration, cette dernière ne serait pas automatique, comme l’a rappelé la Cour d’appel de Versailles le 12 octobre dernier.
Rappel des faits
En 1989, une femme, alors âgée de 76 ans, avait souscrit un contrat d’assurance-vie au bénéfice de sa curatrice et de son mari. Elle y avait effectué un versement initial de 6 000 euros. Vingt-cinq ans plus tard, en 2014, elle avait procédé à deux versements complémentaires de 750 000 euros. Dont un six mois avant son décès.
Mais, l’administration fiscale avait alors estimé que l’objectif principal de ce contrat d’assurance-vie était d’éviter l’imposition. Elle avait alors requalifié la transmission en donation indirecte et avait demandé aux deux bénéficiaires de s’acquitter des droits de mutation correspondants. Elle y avait également ajouté une majoration de 40 % pour manquement délibéré aux obligations déclaratives.
Contestant cette décision, le couple avait alors saisi la justice pour demander la décharge des pénalités pour manquement délibéré.
Pas de majoration automatique
Le 12 octobre dernier, la Cour d’appel de Versailles s’est donc prononcée sur cette affaire. Dans son jugement n° 20/003376, elle a, tout d’abord, confirmé la requalification en donation. Elle avait estimé que la vieille dame avait bien cherché, via son contrat d’assurance-vie, à éviter l’imposition. En effet, « un contrat d’assurance-vie peut être requalifié en donation si les circonstances par lesquelles son bénéficiaire a été désigné révèlent la volonté du souscripteur de l’assurance-vie de se dépouiller de manière irrévocable » ; Conseil d’État, 1ère et 6ème sous-section, 6 février 2006, n° 262312, Jurisdata n° 2006-069622.
Cependant, elle a rejeté la majoration de 40 % pour manquement délibéré aux obligations déclaratives appliquée par l’administration fiscale. Selon la Cour d’appel de Versailles, rien ne permet de prouver que les deux époux aient été au courant d’être les bénéficiaires de ce contrat d’assurance-vie et de la volonté de la souscriptrice avant son décès. De ce fait, elle ne pouvait pas démontrer leur intention de se soustraire aux droits de mutation. La Cour a donc validé leur demande de décharge de la majoration de 40 % pour manquement délibéré.
Dans le cadre d’une requalification d’assurance-vie en donation directe, aucune majoration sur l’impôt dû ne peut donc être demandée, à partir du moment où la volonté des bénéficiaires d’échapper aux droits de mutation ne peut être prouvée.
Pour aller plus loin :
- Découvrir comment faire une donation
- Suivre l’actualité en matière d’assurance-vie
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