La colère commence à gronder chez les acteurs du marché immobilier. Alors que les taux d’intérêts ne cessent d’augmenter depuis le début de l’année, les emprunteurs risquent d’être confrontés à une nouvelle difficulté. En effet, la Banque de France a fixé, en avril dernier, les taux d’usure à 2,40 % sur 20 ans. Ce qui fait craindre aux courtiers l’apparition d’un « effet ciseau ». Un mécanisme qui empêcherait de nombreux ménages de se voir accorder un crédit immobilier.
Qu’est-ce que le taux d’usure
Le taux d’usure est le taux maximum légal auquel les établissements de prêts peuvent prêter de l’argent. Prenant en compte les taux d’intérêt nominal, ainsi que l’assurance emprunteur et les divers frais associés, il est calculé chaque trimestre par la Banque de France. Pour ce faire, cette dernière se base sur les financements accordés par les établissements financiers au cours des trois derniers mois, augmenté d’un tiers. L’objectif étant de protéger les emprunteurs d’éventuels abus.
Au début du mois d’avril, la Banque de France a donc publié le nouveau taux d’usure du deuxième trimestre 2022 : 2,40 % sur une durée de 20 ans ou plus. Un niveau extrêmement bas qui risque de pénaliser de nombreux ménages. Effectivement, combiné à la hausse des taux d’intérêts depuis le début de l’année, le nombre de financements susceptibles de dépasser ce seuil ne cesse d’augmenter et les refus de crédit explosent.
Une méthode de calcul critiquée
Les professionnels du secteur critiquent la méthodologie de la Banque de France pour calculer les taux d’usure. C’est ce qu’a expliqué Olivier Lendrevie, directeur général de Cafpi, à L’Agefi Actifs. « Il y a un défaut structurel dans le calcul du taux d’usure. Ceux du deuxième trimestre sont basés sur les taux décaissés par les banques au premier trimestre. Ce qui induit un décalage de plusieurs mois par rapport à la situation d’aujourd’hui ».
Ainsi, la société de courtage Vousfinancer ; qui déplorait déjà en avril dernier une augmentation de 75 % des refus de financement dans ses agences ; a précisé que « dans certaines, c’est 20 % des dossiers qui ne passent plus à cause du taux d’usure ». Même tendance du côté du courtier immobilier en ligne, Pretto. Les dossiers dépassant le taux d’usure représenteraient 15,2 % depuis le début de l’année, contre 4,3 % seulement en 2021.
Banques et courtiers réduisent leurs frais
Afin de ne pas pénaliser trop d’emprunteurs, plusieurs banques et courtiers ont donc décidé de réduire leurs marges, voire de les supprimer pour les ménages les plus modestes. Malgré tout, cela n’est pas toujours suffisant, comme l’a déploré Maël Bernier, porte-parole de Meilleurtaux. « Les taux d’usure sont une catastrophe depuis des mois, ils pénalisent tous les profils, même les meilleurs ! On a dépassé la question des honoraires depuis longtemps : même en supprimant nos marges, certains dossiers ne passent pas ! »
Face à la grogne des acteurs du marché immobilier, la Banque de France aurait décidé de lancer une consultation sur sa méthode de calcul du taux d’usure. Mais aucune amélioration n’est attendue avant juillet prochain, date à laquelle seront publiés les prochains taux d’usure.
De plus, selon le courtier Pretto, les taux d’intérêt devraient continuer à augmenter dans les mois à venir. En mai, ils auraient encore progressé de 0,1 % et s’établiraient en moyenne à 1,34 % sur 15 ans, 1,49 % sur 20 ans et 1,59 % sur 25 ans.
Pour aller plus loin :
- Ce qu’il faut savoir sur le taux d’usure
- S’informer en matière d‘emprunts
- Retrouver l’article d’origine sur le site de L’Agefi Actifs