Conséquences de la crise économique liée à la Covid-19, de nombreux Français se retrouvent dans l’incapacité d’honorer leurs crédits. Pour 2020, les impayés ont d’ailleurs atteint 22 milliards d’euros, tous crédits confondus (consommation et immobilier). Soit 1 700 euros par ménage emprunteur. Et la situation ne risque pas de s’arranger. En effet, en 2021, le chômage devrait continuer à gagner du terrain et le pouvoir d’achat des Français devrait encore reculer. Et alors que la Commission européenne a autorisé les banques à revendre ces crédits dits « pourris » à des sociétés de recouvrement, l’UFC-Que Choisir a sonné l’alarme sur les méthodes de ces dernières.
15 % de signalements supplémentaires
Dans une étude publiée le 28 janvier, l’UFC-Que Choisir dresse un portrait peu flatteur des sociétés de recouvrement et s’alarme de leurs méthodes. Des pratiques jugées « scandaleuses et parfois proches du harcèlement » selon l’association de consommateurs. Cette dernière aurait d’ailleurs enregistré 15 % de signalements supplémentaires depuis un an.
La façon de procéder est assez simple. Comme le rapporte l’étude de l’UFC-Que Choisir, ces sociétés de recouvrement commencent par « racheter à vil prix des créances jugées irrécouvrables par les banques et dont certaines ne peuvent même plus être réclamées en justice. Dans un second temps, elles font le forcing pour en récupérer le paiement en totalité auprès des consommateurs. »
À noter que les banques sont libres de revendre ces crédits impayés sans en informer les emprunteurs.
Ces pratiques sont soutenues par la Banque centrale européenne (BCE). En décembre dernier, cette dernière a d’ailleurs émis une directive sur ces « non-performant loans » visant à encourager les banques à revendre ces crédits. Comme l’a expliqué Estelle Brack, économiste spécialiste des banques, au Parisien, « cela vise à dégager le bilan des banques pour qu’elles soient en mesure, dans les prochains mois, de délivrer des crédits aux entreprises pour relancer l’économie ».
Des pratiques délétères
Après l’analyse de 400 dossiers, l’UFC-Que Choisir a mis en évidence qu’un signalement sur deux portait sur des méthodes agressives. Les emprunteurs, ainsi que leurs proches, seraient harcelés quotidiennement pendant des mois. Les agents des sociétés de recouvrement n’hésiteraient d’ailleurs pas à faire pression sur les particuliers (ton menaçant, culpabilisation ou encore chantage à la délation aux voisins).
L’association de consommateurs aurait aussi constaté que dans 60 % des cas, les emprunteurs se voient refuser l’accès aux documents justifiant leur dette ou proposer des remises qui auraient le don de ressusciter des dettes éteintes.
De même, 14 % des signalements, porteraient sur des « dettes fantômes ». C’est-à-dire, des crédits dont la validité ne pourrait pas être démontrée ou qui auraient déjà été remboursés.
Un meilleur accompagnement des emprunteurs
Ce marché du rachat de crédits par des sociétés de recouvrement serait estimé à 7 milliards d’euros en 2021. Ces dernières comptent donc bien en profiter. Mais pour l’UFC-Que Choisir, il est primordial d’agir pour éviter les abus. Dans son étude, l’association de consommateurs a donc formulé plusieurs demandes aux législateurs européens afin d’assainir ce secteur.
- Interdire la vente et l’achat de crédits « fantômes » dont la validité ne peut pas être démontrée.
- Informer l’emprunteur avant la vente de son crédit, afin qu’il puisse, s’il le souhaite, racheter sa dette.
- Encadrer les sociétés de recouvrement après le rachat d’un crédit pour éviter qu’elles aient recours à des pratiques agressives.
L’UFC-Que Choisir préconise aussi d’agir, en amont, en prévenant les impayés. Elle voudrait que les établissements bancaires soient obligés de proposer des restructurations de crédit dès le deuxième incident de remboursement et donc avant la vente d’un crédit impayé. À ce jour, seul 30 % des banques le font.
Pour aller plus loin :
- Consulter l’étude de l’UFC-Que Choisir
- Suivre l’actualité en matière de crédits