« Bank run » de la Silicon Valley Bank : les marchés tremblent

14/03/2023

Vendredi 10 mars dernier, la banque préférée des entrepreneurs de la « tech » s’est effondrée, victime d’un « bank run ». La faillite de la Silicon Valley Bank met en lumière l’inquiétude grandissante des acteurs de la finance face à la fragilité d’un système reposant sur la confiance des investisseurs.

La Silicon Valley Bank a fait faillite en 44 heures.

La faillite de la Silicon Valley Bank en 44 heures

44 heures, c’est le temps qu’il a suffi à la Silicon Valley Bank (SVB) pour fermer ses guichets et disparaître définitivement du paysage bancaire et financier. Victime d’un « bank run » (panique bancaire en français), la banque qui finance la tech, s’est effondrée aussi vite qu’une start-up rencontre le succès. Tout commence jeudi 9 mars lorsque la Silicon Valley Bank met le feu aux poudres. Elle annonce une levée de fonds pour faire face à des pertes importantes sur son portefeuille d’obligations. Vent de panique chez ses clients, composés essentiellement de start-ups de la « tech », qui initient un retrait des dépôts massif. Vendredi 10 mars, la SVB n’est plus en mesure d’honorer les demandes de retrait. A la mi-journée, le régulateur bancaire, la Federal Deposit Insurance Corp. (FDIC), transfère les dépôts de la SVB vers une nouvelle entité ad hoc.

La SVB s’est spécialisée dans le financement des fonds de capital risque indispensables au secteur de la « tech ». Elle avait d’abord investi dans les bons du Trésor et des obligations, placements refuges garantis par l’Etat, devenant la 16e banque américaine. Or, le relèvement des taux d’intérêt auquel on assiste depuis plusieurs mois a plusieurs effets. D’abord, à mesure qu’ils augmentent, cela réduit la valeur des obligations précédemment émises dont le rendement semble de moins en moins intéressant. Ensuite l’appétence aux risques des investisseurs s’étiole aussi et, par ricochet, la capacité des entreprises de la « tech » à lever des fonds, les conduisant à puiser dans leurs réserves. C’est la conjonction de ces deux éléments, l’augmentation des retraits alors que les réserves de la banque sont provisoirement dégradées, qui est venu gripper la machine.

Le début d’une crise bancaire ?

Cette banqueroute express est la deuxième plus grosse de l’histoire de la FDIC, après Washington Mutual en 2008. Une situation qui fait donc écho à la crise financière de 2008. Pour rappel, le point de départ de la crise des subprimes était la hausse des taux directeurs de la Réserve fédérale. Mais la comparaison s’arrête là. Car, en 2007, les produits financiers liés aux subprimes s’étaient propagés mondialement sur les marchés. Ici, les banques fragilisées, comme la Silicon Valley Bank, sont peu nombreuses et cantonnées à quelques secteurs précis.

De plus, les autorités américaines sont intervenues en pompiers pour éteindre le feu avant qu’il ne se propage. Ainsi, la secrétaire au Trésor, Janet Yellen, a confirmé qu’elle coopérait avec les autorités bancaires pour éviter une contagion au reste du système bancaire. Le spectre de la crise financière et bancaire de 2007-2008 continue tout de même de planer. L’éventualité d’un sauvetage de la SVB a, cependant, été écarté.

La fin du calme trompeur des marchés financiers

Faisant remonter les souvenirs de 2008 à la surface, le « bank run » de la SVB n’a pas laissé les marchés financiers indifférents. La chute de la banque préférée des entrepreneurs de la « tech » vient enfoncer le clou. L’un des pires scénarios possibles est devenu réalité venant confirmer les inquiétudes que les investisseurs portent depuis plusieurs mois sur l’obligataire, la capacité de la « tech » à se financer, le durcissement des politiques monétaires. La remontée des taux, la plus rapide depuis 40 ans, vient fragiliser le secteur de la « tech » pouvant entraîner le retrait des dépôts d’autres banques comme la SVB.

L’épisode de la SVB n’est pas isolé et fait déjà tanguer d’autres banques au profil similaire. La banque des cryptomonnaies, Silvergate, a annoncé, jeudi 9 mars, sa liquidation. Les investisseurs redoutent donc l’effet domino, mais les marchés n’ont, pour le moment, pas réagi. Depuis le début d’année, les observateurs pointent de nombreux signes évoquant un retournement du marché. Suite à la hausse des taux, le marché des actions est au ralenti depuis le mois de février. Mais rien n’indique que le « bank run » de la SVB va entamer durablement la confiance des investisseurs. Notons qu’en deux jours, suite à l’effondrement de la SVB, les taux à 2 ans ont reculé de 48 points de base. Les investisseurs semblent se rabattre massivement sur les emprunts d’État. Une réaction d’une telle ampleur avait déjà été observée auparavant sur les marchés… en 2008.

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