Depuis la loi Lemoine, seuls les emprunteurs souscrivant des crédits immobiliers de plus de 200 000 euros sont soumis au fameux questionnaire de santé. Au moment de remplir le formulaire, omettre la vérité est considéré comme une fausse déclaration et peut coûter cher. Explications.
Fausses déclarations : que dit la loi ?
C’est parfois tentant d’ « oublier », consciemment ou pas, de signaler un traitement médical ou une réalité de sa profession à risque. Surtout dans un contexte de durcissement des conditions d’octroi de crédits immobiliers. Omettre ou arranger la vérité pour ne pas essuyer un refus ou une surprime pourrait séduire plus d’un emprunteur. Mais ce petit jeu n’en est pas un. Il peut même coûter très cher à qui s’y risque.
« Toute fausse déclaration entraîne potentiellement la nullité du contrat », explique Côme Robet, président de la Chambre Nationale des Conseils Experts Financiers (CNCEF) Crédit. L’issue a le mérite d’être claire. Dans le cas où l’emprunteur n’a pas signalé un problème médical ou une situation particulière dans son questionnaire de santé, mais qu’au cours du remboursement du crédit, il décède, est en arrêt de travail prolongé ou en invalidité permanente, le contrat prend fin. L’article L113-8 du Code des assurances stipule que « le contrat d’assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l’assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l’objet du risque ou en diminue l’opinion pour l’assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l’assuré a été sans influence sur le sinistre ».
Crédit immobilier : des conséquences lourdes
Qui dit fausse déclaration, dit donc annulation de l’assurance-emprunteur de la part de la compagnie d’assurances. Mais ce n’est pas tout. L’assureur est en droit de conserver les primes déjà payées au titre de dommages et intérêts. De plus, il doit prévenir la banque qui peut décider d’annuler le crédit immobilier et demander le remboursement des sommes empruntées.
Les poursuites peuvent aller plus loin s’il y a fraude à l’assurance. L’assuré s’expose alors à une peine de prison de 5 ans et une amende pouvant aller jusqu’à 375 000 euros. « Dans les faits, je n’ai jamais vu cela. J’ai, en revanche, été confronté à des clients qui, pris de remords, ont révélé à leur assureur leur mensonge. La banque avait la possibilité d’annuler l’offre de prêt, ce qu’elle n’a pas fait. Elle a émis un avenant au contrat avec une exclusion de garantie pour les pathologies concernées », détaille Côme Robet.
Il n’y a pas de petits mensonges
« Il ne faut surtout pas écouter les personnes qui incitent à ne pas dire la vérité. Aujourd’hui, il est possible d’assurer des gens qui ont la sclérose en plaques, un cancer ou sont encore atteints de mucoviscidose », assure Delphine Vassard, fondatrice de D.E.G.E Courtage en assurances et courtière spécialiste des risques médicaux et professionnels. Lorsqu’on pense « mensonge », on envisage l’omission de pathologies médicales ou de traitements lourds. Mais les mensonges involontaires sont aussi visés. Par exemple, ne pas indiquer dans le questionnaire de santé que vous fumez alors que vous avez une cigarette électronique est considéré comme une fausse déclaration.
« Des agents du GIGN ne sont pas que des fonctionnaires. Une assistante cadre chargée de vérifier sur le terrain la qualité des installations nucléaires présente un risque singulier. Il en va de même pour le pigiste, en fait reporter de guerre, ou encore pour l’enseignant-chercheur en chimie, qui manipule quotidiennement des explosifs », énumère Delphine Vassard au quotidien Les Échos. Une profession ou même un loisir porteur de risque doit être signalé à l’assureur. Ainsi, la pratique de sports automobiles, sports de combat, parapente ou parachutisme ou encore de l’équitation implique des exclusions de garantie.
Le rôle du conseiller pour éviter les fausses déclarations
Pour remplir correctement un questionnaire de santé, l’assuré doit se reposer sur son conseiller bancaire ou courtier. Ce dernier, en tant que professionnel, a un devoir de conseil auprès de son client. « D’où l’importance de faire une bonne découverte des besoins de son client en amont, pour ne pas passer à côté d’une pratique ou d’une pathologie et ainsi manquer à son devoir de conseil », souligne Côme Robet.
La Cour de cassation a rendu, le 15 septembre 2022, une décision rappelant qu’il ne revient pas au particulier de faire preuve du préjudice. Le contexte de cette décision est simple. Une emprunteuse avait signalé, dans son questionnaire de santé, suivre un traitement médical depuis 15 ans. Elle s’était vu refuser l’application de la garantie d’incapacité de travail. La raison ? Une clause de son contrat excluant « les suites médicales ou conséquences d’antécédents de santé mentionnés sur le bulletin d’adhésion ». Il s’agit là d’un manquement de la banque à son devoir d’information et de conseil, reconnu par la Cour. Afin d’éviter de mauvaises surprises, le questionnaire de santé doit être rempli consciencieusement.
Pour aller plus loin :
- S’informer sur le questionnaire de santé
- S’informer en matière d’Emprunts
- Retrouver l’article d’origine sur les Echos