L’allocation chômage des travailleurs indépendants n’a pas rencontré le succès escompté

01/04/2021

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L’allocation chômage des travailleurs indépendants n’a pas rencontré le succès escompté

Durant la campagne pour l’élection présidentielle de 2017, Emmanuel Macron l’avait promis ! « Nous permettrons à tous les travailleurs d’avoir droit à l’assurance-chômage ». Promesse tenue puisque l’allocation chômage des travailleurs indépendants (ATI) est entrée en vigueur le 19 novembre 2019. En théorie, les chefs d’entreprise et autres travailleurs non-salariés peuvent prétendre, en cas de cessation d’activité, à une allocation de 800 euros pendant six mois. Mais en pratique, les choses sont un peu différentes. En effet, cette aide devait concerner près de 30 000 bénéficiaires. Mais seules 911 personnes auraient réussi à l’obtenir fin février 2021. Le 17 mars dernier, Alain Griset, le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises (PME), a été auditionné par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale sur cette question. Plusieurs députés en ont profité pour faire un point d’étape sur ce dispositif.

Des conditions d’accès trop restrictives

Selon le député LREM Dominique Da Silva et rapporteur d’un cycle d’auditions sur le sujet, les critères exigés pour pouvoir prétendre à l’ATI seraient bien trop restrictifs. Effectivement, pour qu’un travailleur indépendant perçoive cette indemnité chômage, il doit :

  • Avoir fait l’objet d’une liquidation judiciaire ou d’un redressement judiciaire
  • Justifier d’une activité non-salariée et sans interruption pendant au moins 2 ans dans une seule et même entreprise
  • Avoir perçu au moins 10 000 € par an sur les 2 années qui ont précédé la cessation
  • Disposer de ressources personnelles inférieures au montant du RSA, soit moins de 565,34 € par mois pour une personne seule
  • Être inscrit à Pôle Emploi et rechercher activement un emploi

Ces critères excluraient d’office un grand nombre de travailleurs indépendants. En effet, les micro-entrepreneurs, par exemple, ne passent jamais par une liquidation judiciaire. Ils font juste l’objet d’une simple radiation. De même, de nombreux chefs d’entreprise préfèrent cesser leur activité avant d’en arriver au redressement judiciaire.

La condition d’avoir perçu au moins 10 000 € par an sur les 2 années qui ont précédé la cessation exclurait aussi de nombreux travailleurs. C’est ce qu’a expliqué Dominique Da Silva au site Capital.fr. Elle représenterait à elle seule « près de trois-quarts des rejets de dossiers éligibles à l’allocation des travailleurs indépendants ».

Assouplir les conditions d’accès

Le député et rapporteur, Dominique Da Silva, a donc auditionné plusieurs organismes comme Pôle Emploi ou l’Unédic. Il a également entendu des représentants syndicaux et des institutions comme le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce. À la suite de quoi, il a rédigé un rapport. Ce dernier a été présenté, mardi 6 avril, en commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

Dans ce rapport, il préconise notamment d’assouplir les conditions d’accès à l’ATI en supprimant, tout d’abord, l’obligation de subir une liquidation judiciaire ou un redressement judiciaire. En revanche, pour prouver la cessation d’activité, il propose d’y ajouter les liquidations amiables.

Il suggère également d’augmenter le plafond des ressources personnelles « au seuil de pauvreté de 1.063 euros, en prenant en compte l’ensemble des revenus imposables du déclarant, y compris ses revenus d’activité, perçus au cours des douze mois précédant la demande de l’allocation ».

Enfin, certains travailleurs indépendants étant exclus de ce dispositif, il a appelé à l’élargir à tous les statuts juridiques regroupant les travailleurs indépendants. À défaut, le site dédié à l’allocation chômage des indépendants devra énoncer précisément et justifier ces exclusions.

Réformer le financement de ce dispositif

En cette période de crise sanitaire liée au Covid-19, l’État a mis place un certain nombre d’aides pour aider les travailleurs indépendants. Cependant, le président de l’association GSC, qui propose une solution d’assurance-chômage privée pour les indépendants, craint que le nombre de chefs d’entreprises devant fermer leur société explose.

Pour Dominique Da Silva, il est donc urgent de réformer le dispositif mis en place par l’État. À commencer par son mode de financement. Actuellement, l’ATI est financé par l’Unédic. Or, les travailleurs indépendants ne cotisent pas pour cela. Afin d’éviter que l’Unédic ne se retrouve dans le rouge financièrement, le député a proposé que « comme pour l’allocation de solidarité spécifique, il faudrait que le financement de l’allocation chômage des travailleurs indépendants soit assuré par l’État ».

Le rapport de Dominique Da Silva devrait prochainement être remis au gouvernement. En parallèle, le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises, Alain Griset, avait indiqué, lors de son audition, « qu’il comptait faire des propositions au Premier ministre et au président de la République pour améliorer le dispositif ».

« L’idée maintenant, c’est qu’avant la fin de l’année, on puisse libérer l’allocation des travailleurs indépendants de ses contraintes”, a conclu Dominique Da Silva.

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