Fraude fiscale : les nouveaux outils du gouvernement

26/01/2023

Pour améliorer la lutte contre la fraude fiscale, le gouvernement français mise sur de nouveaux outils. Depuis quelques années, la Direction générale des finances publiques (DGFiP) utilise des techniques de datamining pour traquer les fraudeurs. Voici quelques outils désormais utilisés par la DGFiP pour renforcer les contrôles fiscaux.

L’intelligence artificielle au cœur des usages du fisc

Le datamining au cœur des pratiques des services fiscaux.

Le rapport d’évaluation de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale, présenté le 25 octobre 2022, montre que les recettes des contrôles fiscaux sont en hausse ces dernières années. Parallèlement, le bilan du contrat d’objectifs et de moyens de la DGFiP, réalisé par l’Inspection générale des Finances, met en avant le développement du datamining dans les pratiques de l’administration fiscale.

Ainsi, en 2017, seuls 6 % de contrôles fiscaux émanaient de l’usage de l’intelligence artificielle. En 2021, cette proportion s’élève à 45 %. « Ce taux ne concerne que les entreprises. Aujourd’hui, nous n’avons pas un indicateur public de la sorte pour les particuliers. Mais au-delà de ce pourcentage, on s’intéresse aussi aux particuliers, en croisant toutes les données disponibles sur les revenus, les données foncières et patrimoniales ou encore les informations qui arrivent de l’étranger pour repérer des anomalies », analyse Stéphane Créange, adjoint au chef de service du contrôle fiscal à la DGFIP.

Récemment, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a autorisé la collecte et l’exploitation de certaines données publiques permettant ainsi aux impôts de recouper les informations.

Un scan des réseaux sociaux

Conséquence de ce feu vert de la CNIL, les données des internautes disponibles sur les réseaux sociaux peuvent désormais être exploitées. Concrètement, les services fiscaux peuvent utiliser les informations disponibles sur Facebook, LinkedIn ou Twitter. Depuis 2021, une expérimentation à grande échelle de cette mesure est en cours, et ce, jusqu’en 2024. Si le scan des différents comptes d’un contribuable était déjà possible avant, la grande nouveauté est l’usage d’un robot. Ce dernier collecte massivement les données sur les réseaux sociaux, mais aussi celles disponibles sur les sites vitrine qui ne requièrent pas d’identifiant et de mot de passe.

Toutefois, l’usage de ces données par l’administration fiscale est strictement encadré :

  • Suppression des données personnelles et non-utiles à la détection d’une fraude sous 5 jours.
  • Ciblage du type d’infractions recherché. Il s’agit d’une activité occulte, comme activité commerciale non-déclarée ou une fausse domiciliation à l’étranger.
  • L’estimation des revenus ou du patrimoine, via les réseaux sociaux, ne sont pas autorisés.

La traque aux piscines cachées

Depuis 2021, le ciel est également le terrain de chasse de l’administration fiscale. Initiée dans neuf départements (Alpes-Maritimes, Var, Bouches-du-Rhône, Ardèche, Rhône, Haute-Savoie, Morbihan, Maine-et-Loire, Vendée), une opération de surveillance est déployée pour détecter les piscines qui n’ont pas été déclarées et donc non-imposées. Pour rappel, les contribuables sont soumis à une taxe d’aménagement sur les piscines. De plus, la présence d’une piscine peut influer sur la valeur locative d’un bien, base de calcul de la taxe foncière.

Concrètement, l’outil utilisé par le fisc, nommé « Foncier innovant », utilise des images aériennes de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN). L’administration fiscale extrait, par le biais d’un logiciel, les contours des piscines. Ces données permettent ensuite d’enclencher, en cas de fraude, une opération de relance du propriétaire du bien immobilier concerné. Malgré quelques anomalies détectées, le succès de l’expérimentation mène à la généralisation de cette pratique sur tout le territoire. Dans les 9 départements soumis à l’expérimentation, 20 000 piscines non-déclarées ont été repérées pour un gain d’impôt estimé à 40 millions € pour 2023.

Airbnb, Vinted, LeBonCoin : transmission de données obligatoires

Autre outil mis en place depuis 2020, les plateformes de services marchands entre particuliers, comme Airbnb ou LeBonCoin, doivent transmettre les revenus de leurs utilisateurs aux services fiscaux. « Grâce aux déclarations des plateformes, on est capable de vérifier si un contribuable a bien déclaré ses revenus locatifs. Mais il n’y a rien d’automatique », précise Stéphane Créange. Par un jeu de croisement de base de données avec les déclarations de notaires, l’administration fiscale peut alors avoir connaissance de biens détenus pour lesquels il manque une déclaration de revenus fonciers.

Un logiciel pour identifier les liens entre entreprises

Enfin, les services fiscaux ont dévoilé une autre utilisation fiscale du datamining en 2022. Il s’agit de « Galaxie », un logiciel initialement conçu pour lutter contre la fraude fiscale des entreprises. « Galaxie permet au travers des documents que la DGFiP reçoit et les données déclaratives d’identifier les liens entre les entreprises », précise Stéphane Créange. L’objectif : faire la lumière sur les liens entre les entreprises qui ont fait l’objet d’un redressement fiscal ou qui sont en redressement judiciaire frauduleux afin de déceler les éventuels montages.

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