Passoires thermiques : une baisse de loyer imposée aux logements classés G

03/03/2025

Depuis janvier 2025, les logements classés G au diagnostic de performance énergétique (DPE) sont sur liste rouge. Considérés comme indécents, les locataires de ces logements ne peuvent plus prétendre aux aides au logement. Quelles sont les conséquences pour les propriétaires-bailleurs ? Quel est le rôle de la CAF ? Éléments de réponse.

Suppression des aides pour les logements classés G

Logements étiquetés G, interdits ou pas ? Théoriquement, les logements classés G au DPE sont interdits à la location depuis le 1er janvier 2025. Concrètement, seulement 26 % des propriétaires de biens classés G envisagent de réaliser des travaux de rénovation thermique. Autrement dit, les locations classées G continuent d’être disponibles sur le marché de l’immobilier en 2025, malgré la législation.

Face à l’offre de logements jugés indécents, la demande existe en raison de la pénurie de logements dans de nombreuses villes. Selon une étude réalisée par le réseau Guy Hoquet, « 55 % des locataires seraient prêts à louer un bien classé G, à cause des difficultés qu’ils rencontrent actuellement pour trouver un logement ». Toutefois, il ne faut pas croire que les propriétaires-bailleurs qui tentent de passer entre les mailles du filet peuvent échapper à la nouvelle réglementation. En plus du risque de voir leur locataire se retourner contre eux en justice, les propriétaires s’exposent à court terme à des pertes financières.

Depuis la loi Alur de 2014, les Caisses d’allocations familiales (CAF) sont dans l’obligation de suspendre les aides tant que le logement n’est pas considéré comme décent. Autrement dit, si le propriétaire-bailleur n’effectue pas de travaux pour améliorer la performance énergétique, les aides au logement de la CAF ne seront plus versées. Cette mesure concerne actuellement les logements étiquetés G et G+ pour « les baux signés après le 1er janvier 2025 ou au moment du renouvellement ou de la tacite reconduction des baux signés avant cette date ».

Loyer : le manque à gagner à la charge du bailleur

En fermant la vanne des aides, la CAF ne compte pas s’en prendre aux locataires aux revenus modestes, mais bien aux bailleurs. Il s’agit d’une réduction de loyer forcée. Si le locataire perçoit l’aide CAF, il ne paiera que le reliquat de loyer.

La cour de Cassation a statué à plusieurs reprises sur la question. Dans un arrêt prononcé le 14 décembre 2023, elle rappelle que « lorsque l’organisme payeur fait application de la procédure de conservation des allocations de logement pour non-décence du logement (…), le propriétaire ne peut exiger du locataire que le paiement du montant du loyer et des charges récupérables, diminué du montant des allocations de logement ». Si le propriétaire-bailleur est le destinataire de l’aide, il ne la percevra tout simplement plus. Selon le ministère du Développement durable, les aides au logement représenteraient 200 à 300 euros par mois en moyenne en 2023. Une somme non-négligeable.

Comment récupérer l’aide au logement versée par la CAF ? Le propriétaire du logement dispose de 18 mois pour réaliser les travaux. Une fois les travaux réalisés, le propriétaire doit fournir un nouveau DPE pour percevoir l’ensemble des aides non versées. « L’objectif, souligne Louis du Merle, est d’amener le propriétaire du bien à faire les travaux de rénovations thermiques », explique Louis du Merle, le directeur juridique de l’Agence nationale pour l’information sur le logement (Anil).

La CAF transformée en gendarme des DPE

Comment la CAF peut-elle avoir accès à l’information selon laquelle le logement loué est classé G ? À la Caisse nationale des allocations familiales, la procédure est enclenchée sur la base d’« un signalement » qui peut venir du locataire, d’un tiers ou d’un travailleur social. Par la suite, un contrôle de décence peut être demandé par la CAF. Dans ce cas, un opérateur agréé se rendra au logement pour s’assurer de l’état réel de la location et s’assurer que les normes sont respectées.

Mais avant d’avoir un contrôle de décence, les agents de la CAF vont devoir se transformer en détectives et procéder à quelques vérifications. Une instruction diffusée à la CAF en décembre 2024 enjoint les agents de contrôler la conformité des DPE et, si possible, de récupérer le contrat de location pour connaître la date de renouvellement.

Un possible répit pour les bailleurs ?

Afin de ne pas tomber dans une impasse qui viendrait bloquer davantage le marché locatif, une proposition de loi sur l’aménagement des interdictions de locations des logements étiquetés G a été étudiée au Parlement. Si l’Assemblée nationale l’a rejetée, le Sénat l’a remise sur la table pour un vote en avril.

Ce texte de loi est destiné à accorder un répit aux bailleurs afin de permettre de maintenir l’autorisation locative. Si le texte est voté, les agents de la CAF devront revoir leur copie. Les propriétaires pourraient donc continuer de percevoir les aides au logement.

Toutefois, il semblerait que la CAF soit encore dans une phase de transition. La Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) n’est toujours pas en mesure de communiquer le nombre exact de suspension d’aides effectué pour des logements classés G+, alors que l’interdiction est en vigueur depuis 2 ans. Pour connaître l’efficacité des dispositions incitatives pour améliorer la performance énergétique des locations, il faudra donc repasser.

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