Escroquerie : la banque est-elle tenue de rembourser ses clients ?

30/01/2025

Dans une décision rendue le 15 janvier, la Cour de cassation a rappelé que « l’obligation pour la banque de rembourser ses clients victimes d’escroquerie n’est pas absolue ». Dans quels cas peut-on exiger un remboursement ? Quelles sont les règles ?

Remboursement : l’obligation absolue de la banque n’existe pas

Le 15 janvier 2025, suite à deux décisions rendues sur deux affaires traitant d’escroquerie, la Cour de cassation publie un communiqué de presse rappelant les devoirs des établissements bancaires vis-à-vis de leurs clients en cas d’escroquerie : « Les banques doivent rembourser leurs clients victimes d’escroquerie bancaire ».

Toutefois, la Cour précise qu’« elles ne sont pas tenues d’effectuer ce remboursement, même partiel » , si le client a une part de responsabilité dans l’affaire :

  • en cas de négligence grave de leur client ;
  • en cas de virement effectué sur la base d’un identifiant bancaire fourni par leur client, mais qui ne vise pas le bon bénéficiaire.

Cas de non-obligation de remboursement par la banque

Pour mieux comprendre comment s’appliquent ces limites édictées par la Cour de cassation, examinons les affaires concernées.

Le premier dossier est présenté par deux entreprises qui ont porté plainte contre leur banque après avoir noté six virements ordonnés depuis l’ordinateur du comptable des sociétés au profit de comptes bancaires inconnus à l’étranger. Les entreprises victimes ont engagé la responsabilité de la banque dans l’opération qui a refusé d’effectuer un remboursement des sommes versées.

La Cour d’appel a estimé que, dans cette affaire, les torts étaient partagés. Pour elle, seule une négligence grave des entreprises a permis le succès de l’escroquerie, mais la banque est aussi coupable et condamnée à rembourser 50 % des pertes subies. Dans cette affaire, la Cour de cassation a montré que « le client a commis une négligence grave qui l’a conduit à se faire escroquer ». La banque n’a donc pas l’obligation de le rembourser (art L.133-19).

Cas d’obligation de remboursement par la banque

La seconde affaire mise en avant par le Cour de cassation concerne un couple ayant acheté un véhicule sur internet en procédant à deux virements bancaires en se basant sur l’IBAN fourni par courriel. Le vendeur a signalé n’avoir reçu aucun des deux virements. Le couple a alors réalisé qu’ils avaient été victimes de piratage informatique au cours de leurs échanges électroniques. Un escroc avait substitué son propre IBAN dans les courriels récupérant ainsi l’argent à la place du vendeur. Le couple a saisi la justice qui a rappelé que le code monétaire et financier prévoit qu’« une banque ne peut voir sa responsabilité engagée lorsque son client lui fournit un mauvais IBAN ». Toutefois, elle a aussi signalé que la banque est tenue à un devoir de vigilance non-rempli étant donné que l’IBAN transmis contenait des anomalies apparentes.

Le cas a été présenté devant la Cour de cassation. Cette dernière rappelle alors que « selon le code monétaire et financier, une banque qui exécute un virement en se basant sur un identifiant (RIB/IBAN) fourni par son client ne peut être tenue responsable de l’opération de paiement lorsque l’identifiant n’oriente pas le transfert de fonds vers le bénéficiaire souhaité (art. L 133-21) ».

Toutefois, cet article ne tient pas compte des faits suivants :

  • l’origine de l’IBAN (piratage informatique),
  • le fait que la banque n’a pas détecté les anomalies apparentes de l’IBAN fourni.

De ce fait, la Cour de cassation estime qu’il ne peut pas y avoir partage de responsabilité. Elle annule donc la décision de la Cour d’appel. Il peut donc y avoir remboursement complet ou partiel du client par la banque.

Pour aller plus loin :