Bourse : la Fed face aux craintes d’une récession

03/08/2024

Les mauvais chiffres de l’emploi aux Etats-Unis, publiés le 2 août, viennent raviver les craintes d’une récession outre-Atlantique. La Réserve fédérale a-t-elle mal évalué la situation en maintenant les taux d’intérêt au plus haut ? Les places boursières n’ont pas attendu la réponse pour tenir compte de la perte de vitalité de l’économie américaine. Résultat, la Bourse de Paris décroche enregistrant son niveau le plus bas cette année.

La vitalité de l’économie américaine au cœur des préoccupations

L’ombre d’une récession se précise après la publication du rapport mensuel sur l’emploi aux Etats-Unis, le 2 août. Très surveillé, car signe annonciateur d’une crise, le taux de chômage américain est en hausse. En juillet, il a augmenté de deux dixièmes, atteignant son niveau le plus haut en trois ans (4,3 %). Seulement 114 000 postes ont été créés, contre 175 000 prévus. Le solde des mois précédents a également été revu à la baisse.

« Le chômage a augmenté de manière inattendue pour atteindre 4,3 %, ce qui a déclenché l’indicateur de récession appelé ‘règle de Sahm’ », explique Stephen Brown, analyste chez Pepperstone, pour le quotidien Les Échos. La règle de Sahm pose que l’économie entre en récession, si la moyenne mobile sur 3 mois du taux de chômage augmente d’au moins un demi-point de pourcentage par rapport à son niveau le plus bas des 12 derniers mois.

Toutefois, plusieurs spécialistes, dont Stephen Brown, mettent en garde contre une trop rapide interprétation de la règle de Sahm. Dans le contexte actuel, le chiffre de l’emploi doit être remis dans un contexte d’une baisse des emplois, mais aussi d’une forte croissance de la main-d’œuvre avec des niveaux d’immigration records.

Un temps de réaction trop long de la Fed ?

La Réserve fédérale a-t-elle maintenu ses taux d’intérêts hauts trop longtemps ? C’est la crainte de nombreux investisseurs qui estiment que l’allongement du temps de réaction a porté préjudice à l’économie américaine. « Le ralentissement du marché du travail se matérialise désormais avec plus de clarté […] et la Fed espère qu’elle n’a pas, une fois de plus, été trop lente à agir », affirme Seema Shah, de Principal Asset Management. De leurs côtés, les experts de Capital Economics estiment que la forte hausse du chômage et le ralentissement du marché de l’emploi vont inévitablement conduire à une baisse des taux en septembre. Les spéculations convergent vers une réduction de 50 points de base.

Le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, a confirmé cette théorie, mercredi 31 juillet. L’assouplissement de la politique monétaire devait être à l’ordre du jour de la réunion de septembre. Mais la publication des derniers chiffres relatifs à l’état de l’économie américaine ravive les craintes : un retard à l’allumage pourrait obliger la banque centrale à redoubler d’efforts pour se rattraper. Très sensible à la politique monétaire, le rendement des obligations du Trésor à deux ans est, pour la première fois depuis plus d’un an, tombé en dessous des 4 % sur le marché secondaire de la dette.

La Bourse décroche face à l’éventualité d’une récession

Que la Fed décide d’abaisser les taux en septembre ou non, la Bourse a déjà intégré les risques relatifs à une éventuelle crise économique. À la suite de la publication des chiffres de l’emploi, la Bourse de Paris a connu son plus fort repli de l’année, de 1,61 %. Le CAC 40 clôture ainsi à 7 251,80 points, avec un important volume d’échanges de 4,6 milliards d’euros. De l’autre côté de l’Atlantique, le Dow Jones et le S&P 500, de Wall Street, accusent une baisse de plus de 2 %. Reflet de la santé du secteur technologique, le Nasdaq Composite des valeurs technologiques connaît également une baisse de 3 %.

Ces réactions des places boursières ne se fondent pas uniquement sur des spéculations. Les failles de l’économie américaine sont réelles. L’entreprise américaine, Intel, a annoncé son intention, cette année, de licencier 15 000 salariés et de suspendre le versement de dividendes. L’objectif : réduire les coûts pour améliorer les flux de trésorerie. L’action d’Intel a alors vu son cours plonger de 28 %, plus forte baisse de l’action depuis septembre 2000. La multinationale Amazon accuse également le coup avec une prévision des ventes inférieures aux attente et une rentabilité affectée par les investissements dans l’IA. Par ricochet, l’action en bourse perd donc 11 %. La réunion de septembre de la Réserve fédérale pourrait jouer un rôle décisif dans l’évolution de l’économie américaine, un des sujets clé des élections présidentielles à venir.

Pour aller plus loin :