
La suspension de la réforme des retraites promise par le Premier ministre Sébastien Lecornu a été adoptée par la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale. Cependant, le texte final a été rejeté, rouvrant les débats dans l’hémicycle. Le point sur la situation.
Pourquoi la réforme des retraites est-elle suspendue ?
Promesse du Premier ministre tenue ? Sébastien Lecornu avait, dans son discours de politique générale, le 14 octobre, annoncé qu’il proposerait la suspension de la réforme des retraites à l’Assemblée nationale : « Je proposerai au Parlement que nous suspendions la réforme de 2023 sur les retraites jusqu’à l’élection présidentielle. Aucun relèvement de l’âge n’interviendra à partir de maintenant jusqu’en janvier 2028 », « en complément, la durée d’assurance sera elle aussi suspendue et restera à 170 trimestres jusqu’à janvier 2028 ».
La commission des Affaires sociales a voté en majorité la suspension de la réforme des retraites de 2023 jusqu’aux prochaines élections présidentielles en 2027, le 31 octobre. L’objectif de cette mise en pause est principalement d’éviter les tensions sociales qui pourraient conduire à une nouvelle démission du gouvernement, et à une probable dissolution de l’assemblée.
La suspension ne signifie pas l’annulation. Le débat autour de la réforme des retraites reste ouvert, notamment les modalités de financement de cette suspension dans le cadre du budget de la Sécurité sociale.
Les conséquences de la suspension de la réforme des retraites
Le 23 octobre, le gouvernement a adopté la lettre rectificative au Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2026), créant un article modifiant les points suivants :
- l’âge légal de la retraite est reporté d’un trimestre de la génération 1964 jusque celle de 1968 ;
- la durée d’assurance requise pour bénéficier du taux plein est réduite d’un trimestre, soit 170 trimestres au lieu de 171 si né en 1964 et 171 trimestres au lieu de 172 si né en 1965.
Toutefois, en annulant l’article 44 sur le gel des pensions de retraite des prestations sociales, la commission des Affaires de l’Assemblée rejette le texte final du PLFSS 2026. Rien n’est donc joué pour le moment. Pour que l’article 45 bis actant la suspension de la réforme soit effectif, le PLFSS 2026 doit être adopté par l’hémicycle cette semaine.
Quels changements en cas de vote du PLFSS 2026 ?
Les débats à l’Assemblée nationale qui ont lieu le 4 novembre sont déterminants. Si les amendements au texte initial sont votés, de nombreuses mesures proposées vont disparaître, notamment le gel des barèmes pour 2026.
PLFSS 2026 : nouvel âge de départ à la retraite proposé
Concrètement, la suspension de la réforme des retraites impacterait directement les contribuables nés entre 1964 et 1968.
| Naissance | Âge légal de départ | Trimestres exigés |
| 1963 | 62 ans et 9 mois | 170 |
| 1964 | 62 ans et 9 mois | 170 |
| 1965 | 63 ans | 171 |
| 1966 | 63 ans et 3 mois | 172 |
| 1967 | 63 ans et 6 mois | 172 |
| 1968 | 63 ans et 9 mois | 172 |
| 1969 et après | 64 ans | 172 |
Source : Article 45 bis PLFSS 2026 du 23 octobre 2025.
Gel du barème des taux des cotisations sociales des retraités en 2025
La question du gel des barèmes voulu pour 2026 est la principale raison du refus du texte par la commission Affaires de l’Assemblée nationale. Cette dernière a adopté plusieurs amendements proposant la suppression de cet article. Le principal motif est que le barème gelé s’appliquerait à des retraites ayant bénéficié de la plus forte revalorisation des retraites, soit 5,3 %.
En cas de gel, les retraités, jusqu’à présent exonérés, seront donc nombreux à rattraper le barème des taux de cotisations sociales. Seuls les retraités déjà soumis à 4,3 % vont attendre un an pour subir la hausse. Ceux au taux médian de 7,4 % passeront tout de suite à 9,1 %, taux dit normal. Si l’article 6 du PLFSS est supprimé définitivement à l’issue des débats, le barème sera revalorisé normalement.
Revalorisation des retraites de base de 2026 à 2030
À l’instar du gel du barème des taux de cotisation, la commission des Affaires sociales a voté en majorité pour supprimer l’article proposant le gel des pensions de retraite de base.
Si l’article 44 réformant la revalorisation des retraites de base obligatoire est maintenu dans le PLFSS, les règles changent de 2026 à 2030 :
- Pas de revalorisation en 2026.
- Revalorisation réduite à 0,9 en 2027.
- Revalorisation réduite de 0,4 de 2028 à 2030.
Cette proposition s’inscrit dans la logique d’économie budgétaire exigée.
Nouvelle base pour calculer la retraite des femmes dès 2026
Le projet de loi reprend aussi les mesures de la « délégation paritaire permanente », refusée début 2025 par le patronat lors du « conclave ». Elle reprend une nouvelle base pour le calcul de la retraite des mères rattachées au régime général, travailleuses indépendantes et les salariées agricoles. Leur revenu annuel moyen ne serait ainsi plus calculé sur les 25 meilleures années mais sur :
- les 24 meilleures années pour les mères d’un enfant ;
- les 23 meilleures années pour celles qui ont eu deux enfants et plus.
Si le texte est adopté en l’état, la mesure proposée ajoute aussi deux trimestres réputés cotisés aux trimestres nécessaires pour bénéficier d’une carrière longue. Ces deux trimestres sont pris dans ceux obtenus avec la majoration de durée d’assurance pour enfant (maternité, éducation, adoption et congé parental).
Réforme du cumul « emploi-retraite » en 2027
Concernant le cumul « emploi-retraite », la mesure proposée dans le PLFSS reprend les recommandations de la Cour des comptes. L’écrêtement de la retraite s’appliquerait comme suit en fonction de l’âge :
- avant l’âge légal (entre et 62 et 64 ans), écrêtement de la retraite à hauteur de 100 % des revenus en cas de reprise d’activité et ce dès le premier euro (valorise le dispositif de retraite progressive plus avantageux) ;
- entre l’âge légal et l’âge d’annulation de la décote (67 ans) : un cumul emploi-retraite partiel avec écrêtement de la retraite à hauteur de 50 % des revenus d’activité supérieurs à un seuil ;
- après l’âge d’annulation de la décote (67 ans) : un cumul intégral libre permettant la création de droit à une seconde pension.
Ce qu’il faut retenir
- La suspension de la réforme des retraites a été approuvée à la majorité à l’Assemblée nationale.
- En revanche, le texte final du PLFSS 2026 n’ayant pas été adopté, il faut attendre les débats à l’Assemblée nationale pour officialiser la mesure.
Pour aller plus loin :
- Pour suivre l’évolution du vote du PLFSS 2026, rendez-vous sur le site de l’Assemblée nationale,
- S’informer en matière de Retraite,
- Retrouver l’article d’origine sur cfdt-retraités.fr.
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